Jess est sur Toulon. Rien avant lundi soir. Ici ya du sable!
Jeudi 5 octobre 2006 à 20:57
J'entends des jurons dans une autre langue et peux observer une foule entière qui détourne la tête. Je les trouve juste très mal-polis et puis après tout peut-être disent-ils des mots d'amour. Le monsieur devant moi remets ses lunettes et garde son air offusqué d'homme dérangé par les cris. Il garde le dernier bouton de sa chemise fermé et les lèvres pincées. Il plissent les yeux. Les tend, regarde et reregarde sa montre en remontant sa manche de quelques centimètres. Ouvre sa poche. La referme et croise les mains. Il se triture le pouce du bout de son ongle et se grignote l'intérieur de la bouche du bout des dents. Les autres crient toujours. Il grignote. Je regarde un étudiant qui manque de tomber et se ratrappe. La pensée des jurons nous lie tous. Les gens s'observent entre eux espérant trouver une vague étincelle de solidarité. Personne ne bouge tout le monde écoute. Ils ne comprennent pas plus qu'ils ne bougent. Et la voix féminine annonce l'arrêt sur le même ton que la veille et l'avant-veille. Certains descendent d'autres montent les mots d'amour accueillent les nouveaux arrivants qui se plissent automatiquement.
Mercredi 4 octobre 2006 à 18:35
J'ai une bonne centaine de kilos de boulot.
Et j'ai lu une interview de Doisneau. Vous aurez des passages en fin de soirée.
_ Bourdieu remarquait que la plupart des photos ne supposent pas un rapport social avec les gens, sauf les vôtres.
Robert Doisneau : Je suppose que c'est une façon différente d'approcher les gens. L'autre jour pour un film que fait Claude Gallot sur des photographes âgés, on se trouvait dans une rue d'Arcueil, devant ce décor qui n'a pas beaucoup changé, et il ne se passait rien. Tout d'un coup arrive une moto avec un garçon et une fille, très beaux, la caméra les intéresse, je leur dis que c'est le ciel qui vous envoie vous allez refaire ce passage pour nous. Pas question, ils ne voulaient surtout pas, c'est un couple qui visiblement ne voulait pas se montrer à l'écran. Alors ils veulent s'enfuir, mais la moto refuse de démarrer. Et on a eu cette scène, dans ce décor de banlieue un peu lépreux, de cette fille qui poussait la moto, on les a vus disparaître sur 150 mètres, elle courant derrière avec sa mini-jupe en l'air, c'était formidable. Ca on ne peut pas l'acheter, c'est la proposition du hasard, elle est toujours au-delà de la proposition littéraire ou cinématographique qu'on aurait pu avoir.
_ Robert DOISNEAU Collection PHOTO POCHE
Mardi 3 octobre 2006 à 19:02
Puis oubliage de pochette à dessins. Montage dans le bus. Stop. Je redescend. Je marche. J'arrive. Une troupe de baskets-survet me regarde droit dans les yeux ma pochette à dessin à la main empoignant toutes mes planches et les jetant au vent. Les feuilles virevoltent. C'en est presque beau. Je regarde la scène insolite. Mes dessins. Mes quelques vingt heures de boulot qui s'envolent et slaloment entre leurs pieds. Eux, ils ne me voient pas. Puis je m'approche. Ils lèvent leurs yeux leurs sourires se figent. Je les observe, ils disparaissent sous terre. Je prend ma pochette. Ramasse un, deux, trois dessins. Ils restent immobilent. Ne rigolent pas. Ne parlent pas. Me regarde ramasser les dessins. C'est maintenant moi qui slalome entre leurs pieds. Ils sont beaucoup et j'ai peur. Mais se taisent. Il y a des trous. De la terre. Je ferme la pochette. Les regarde et m'en vais.
Lundi 2 octobre 2006 à 23:25
Trop de maintenance cowblogienne pour ma petite soirée. J'ai la tête et les esprits bien fatigués. Je passe juste vous poster mon chef d'oeuvre d'aujourd'hui. Ma maman avec les bras qui sortent des oreilles. Moi, la blonde au tee-shirt vert dans le tram et également la troisième fleur sur la colline. Le soleil est défoncé et les couleurs respirent bon. Le jaune sent le citron et le beige l'amande, le vert la pomme et le rouge la fraise. La feuille est immense en vrai et en perm' on se foutait de moi. Je décampe.