J'entends des grésillements. De la musique trop forte dans des oreilles qui crient à l'aide. Le garçon d'en face. Il est à gauche de la dame chic. Et à droite du travailleur énervé par le cours de danse de la ptite qui tombe pile dans sa phone-conf. A côté de moi le copain du travailleur lui demande comment va le couple Doucet. Ca parle boulot. Vélo entre midi et deux. Divorce des collègues. Typique. Les places de train sont regroupées par six. Dans de petites cabines alignées le long d'un immense couloir qui forme le wagon. Je suis à la place 51. La chic dame à la place 56. Les oreilles qui grésillent place 54. Le père de famille place 52 et son collègue 53. Les fauteuils sentent le vieux cuir. Les rideaux marrons me font penser à un épisode de Tintin. Je descends au prochain arrêt. Gare.
J'aime la bibliothèque de Grenoble avec ses longs bureaux et ses gens sérieux. C'est un lieu qui a le don de regrouper des dizaines de personnes dans un silence total. J'entre la porte crisse. Des têtes se tournent et me fixent d'un oeil hagard puis se refourent dans leurs livres. Je traverse. Prends l'allée sur le côté. Passe près des sciences sociales et de la table des quatres chinoises. Je continue. Beaux-Arts magasine est tout labas labas au fond sur le présentoir. Je croise un jeune homme. Le panneau des toilettes. Aperçois le comptoir des lois sur la famille. La tête dans leurs bouquins et le stylo à la main les étudiants ne bougent pas. C'est un monde sourd. Je ne perçois que le bruit des pages qui tournent et les mines qui rippent sur le papier. Je m'assois moi aussi. Dans un grand fauteuil rond en fer. Qui fait des zigzags dans mon dos. C'est beau. Le magasine parle de designers. Je vois des têtes. Qui se lèvent. Je lis certains manques d'inspiration passagers sur des bouches qui mordent des bic. J'ai acheté un bic à un euro à une association qui amène des fourniture scolaires en 4L au Maroc. Je me dis que ça doit être drôlement long d'aller au Maroc en 4L...
